samedi 11 juin 2011

A la découverte des chasseurs-cueilleurs

Pour beaucoup d’entre nous, étant jeune, la préhistoire c’est un peu Jules Verne à l’envers. La découverte des chasseurs-cueilleurs est en quelque sorte une aventure dans un espace-temps qui se nourrit à la base dans les faits et gestes de cette préhistoire qui n’a de cesse simultanément d’entretenir notre imaginaire. Un vrai Voyage au centre de la préhistoire ou encore, La grotte mystérieuse.
Serge Maury et Clémentine Pace co-auteurs de Préhistoire, à la découverte des chasseurs-cueilleurs publié en Dordogne par Emmanuelle Garcia
Réunis à la librairie Des Livres et nous, Emmanuelle Garcia, Clémentine Pace et Serge Maury
© Hervé Chassain - journal Sud Ouest
Serge Maury au texte et Clémentine Pace au dessin — publié par Emmanuelle Garcia — n’ont pas cédé de leur regard d’enfant face à leurs connaissances scientifiques. Notre aventure humaine est autant la leur que la notre. Leurs questions sont aussi les nôtres. Et leurs réponses deviennent ainsi les nôtres.

Préhistoire de Serge Maury, illustré par Clémentine Pace et publié par Emmanuelle GarciaCe livre est un délicat travail de mémoire où se mêlent sans se contrarier nos visions chimériques sur les hommes de Cro-Magnon, leurs modes de vie, leurs outils et leurs paysages, le climat et les animaux. Serge Maury qui fut archéologue départemental en Dordogne, avec la rigueur du scientifique utilise un discours pour l’enfant qui sommeille en chacun de nous. Clémentine Pace, familière des fouilles, traduit dans des graphismes et dessins contemporains et respectueux de nos visions espiègles, accompagne sans le rompre le tracé de Serge Maury. Il s’en dégage une atmosphère récréative et enrichissante. Si l’archéologie essaie de faire parler et de redonner vie à ce qui est enfoui, fossilisé, en ce sens, ce livre est une réussite.

Présenté comme un livre pour enfant, l’ouvrage avant tout un livre de famille car il en appelle avec fraîcheur et efficacité à la jeunesse de l’esprit. Celle des mots et des images qui donnent du bonheur, du plaisir à apprendre.

Apprendre la préhistoire ne saurait être synonyme d’ennui, d’effort surhumain, bien au contraire. C’est l’itinéraire d’un enfant qui découvre à dix ans son premier musée de préhistoire, visite des fouilles avec son lycée, s’inscrit à la fac de préhistoire et, justement, choisi sa spécialité : la tracéologie. En fait, il entre en préhistoire. Les auteurs nous laissent, presque en conclusion, ce constat : « Les principales richesses du chasseur-cueilleur sont celles du partage, de l’échange, de la transmission, de son expérience et de ses connaissances ». Belle réflexion qui invite à l’humilité face à cette préhistoire pas si obscure que l’on voudrait la faire passer.
Auteur : Pascal SERRE

« 
Préhistoire, à la découverte des chasseurs-cueilleurs »

Serge Maury et Emmanuelle Garcia, illustrations de Clémentine Pace, Editions Mama Josefa
44 pages, 14,50 €

Pensée de la semaine

« Il y a les livres que j’aime et ceux que j’admire ; je peux admirer un livre sans l’aimer. »
Jorge Amado (1912-2001). Écrivain brésilien.

samedi 4 juin 2011

Michel Souloumiac - La Résistance en pays de la force

l’heure où la roue du temps poursuit inexorablement son œuvre, que se multiplient les ouvrages d’historiens et témoignages de survivants de la « Résistance », Michel Souloumiac souscrit à cette mémoire vivante par un travail qui met en exergue une région précise : le pays de La Force.


La Résistance en pays de la force, un récit historique de Michel Souloumiac
Historien, président de l’Association de recherches archéologiques et historiques du pays de La Force, l’auteur a parcouru non seulement les archives toujours incomplètes sur cette période qui couvre les années 1940-1945 mais aussi rencontré les rescapés.
C’est à partir de Pierre Pinson de Russel, originaire de Prigonrieux, près de Bergerac, que prend naissance au début de l’année 1942 le groupe Loiseau. Pierre Pinson perdra la vie en juillet 1944 mais son groupe poursuivra les combats de la Libération. Il participera plus particulièrement aux opérations sur le front de La Rochelle où les allemands ne capituleront que le 8 mai 1945.

Le rôle et l’action de Pierre Pinson ne se limitent pas à son itinéraire de résistant ; il a protégé et sauvé des juifs dont, notamment, les familles Fenster et Klapholz qui attestent aujourd’hui de leurs destins mis en danger par l’antisémitisme nazi. Michel Souloumiac rappelle que ces faits font l’objet d’un dossier déposé auprès du comité Yad Vashem afin de le faire reconnaître « Juste parmi les Nations ».

Michel Souloumiac par jacques boujou, journal Sud Ouest
Michel Souloumiac Historien mars 2011 © jacques boujou (pour le Sud Ouest)
Michel Souloumiac développe ainsi la présence des étrangers dans cette partie du Périgord, à cette époque. Il nous aide à mesurer combien certains Périgordins risquèrent pour le moins leur vie, préservant en ces actes discrets pas toujours connus les principes et valeurs de la France.
Là où un siècle plus tôt le philosophe Maine de Biran éclairait de ses pensées et écrits ses contemporains, Michel Souloumiac nous propose un exercice de mémoire salutaire. L’historien y cède aussi à l’homme qui sait qu’en abandonnant le passé on est condamné à en revivre les pages sombres et malheureuses.
Auteur : Pascal SERRE


« Le commandant Pinson, La Résistance en Pays de La Force »

Michel Souloumiac, éditions de l’ARAH
96 pages. 15 €

Pensée de la semaine

« Quand vous faites un livre, il y autant d’interprétations du livre que vous pouvez avoir de lecteurs. »
Jean-Paul Dubois (1950). Ecrivain français né à Toulouse.
vendredi 20 mai 2011

Les Compagnons de la chanson : Entre mythe et évidences

Ils étaient neuf garçons, marchands de bonheur qui, à la sortie de la guerre entreprennent d'accompagner nos « Trente glorieuses », avec un style qui décline la chanson traditionnelle française avec une conception contemporaine. Cette modernité musicale et chansonnière amènera « Les Compagnons de la chanson » au sommet de la gloire. L'aventure durera sous diverses fortunes près d'un demi siècle d'histoire de France. Ils illustrent les plus belles heures du music-hall qu'Édith Piaf a largement encouragé.

Un destin difficilement mesurable aujourd'hui de par un silence médiatique que les auteurs de cette biographie très fouillée, documentée et illustrée rompent avec affection sans écarter Hubert Lancelot, biographe officiel.

Ce travail de mémoire est dû à la rencontre de deux hommes : Jean-Louis Petriac, éditeur à Périgueux et Christian Fouinat qui a suivi « Les Compagnons de la chanson » depuis 1956. C'est à l'issue d'un échange lors du Festival de la chanson vivante d'Annecy à l'automne 2008 qu'ils se lancent dans ce qu'ils veulent présenter comme un hommage. Tous deux, amis et admirateurs des « Compagnons de la chanson » avaient déjà commis un premier ouvrage moins complet l'année d'avant et, c'est ainsi, qu'ils se retrouvaient dans la cité savoyarde à méditer sur le mythe abandonné de ce groupe d'exception.


Couverture du livre de Christian Fouinac et Louis Petriac : Les Compagnons de la chanson : Entre mythe et évidences

Guy Bourguignon dans le sketch « Les perruques »


Il faut souligner que l'un des Compagnons - dont il reste quatre survivants - Guy Bourguignon, avait de solides attaches en Dordogne. A Périgueux, Marguerite Ferrel-Moulinier, tenait un commerce de porcelaine rue des Chaînes. Son arrière-grand-mère appelée affectueusement Maman Atou fut la première maître d'armes de France. Guy Bourguignon possédait une maison à Coulaures aujourd'hui habitée par son fils, Jean-Michel. La disparition de Guy Bourguigon en décembre 1969 marqua durablement le groupe.

« Il faut dire, soulignent les auteurs du livre qu'on repérait aisément Guy Bourguignon, avec sa voix basse, sa haute stature et sa silhouette un peu voûtée, sa dentition proéminente aussi, qui lui avait valu maints surnoms. »

Après la disparition de leur bienfaitrice, Édith Piaf, six ans plus tôt, « Les Compagnons de la chanson » accusaient le coup dans la douleur. C'était un pilier, un phare qui ne fut jamais remplacé.
Il y a désormais vingt ans que « Les Compagnons de la chanson » ont fait leurs adieux. Si la génération de l'immédiate après-guerre garde une nostalgie de ce groupe mythique on peut s'étonner que les médias actuels n'accordent que peu de place au patrimoine de création dû au groupe mais encore à l'incarnation d'une époque exceptionnelle à bien des égards.

Christian Fouinat et Jean-Louis Petriac offrent, par leur ouvrage, une occasion inédite et frappante de découvrir, au travers de témoignages et anecdotes, l'histoire non seulement des « Compagnons de la chanson » mais aussi de toute une période qui fut, rappelons-le, celle des Trente glorieuses. À l'image des « Compagnons de la chanson ».
Auteur : Pascal SERRE

Les compagnons de la Chanson : Entre mythe et évidences

Christian Fouinat et Louis Petriac.
351 pages. Édition Decal'Age productions. 26 €

Pensée de la semaine

« Un livre qu'on quitte sans en avoir extrait quelque chose est un livre qu'on a pas lu. »
Antoine Albalat (1856-1935) Écrivain et spécialiste de littérature française.